• Les lettre de Servet Michel en prison

      Les lettre de Servet Michel en prison Les trois lettres de Michel Servet.


    Les lettre de Servet Michel en prison

    Avant d'énoncer ses trois lettres, il est impérieux de rappeler les derniers moments de liberté de Michel Servet (1509 ou 1511 - 27 octobre 1553), et des évènements qui l'amenèrent pour sa destination finale.

        Depuis son évasion de la prison de Vienne, le 7 avril 1553, Michel Servet avait 'disparu' si bien que courraient déjà des suppositions ou des rumeurs annonçant même sa mort. Melanchthon, dans cette même année 1553, dans l'édition de la traduction allemande de ses Loci Theologici (Heubtartikel Christlicher Lere), parlait de Servet : "A Paris récemment devenu fou dans une absurdité cruelle il est mort" (der zu Paris neulich rasend dans grausamer Unsinnigkeit gestorben ist).

        Calvin
    , cependant, tirant une conclusion erronée d'un correspondant récemment retourné à Zurich d'Italie, et considérablement préoccupé par la large diffusion des vues de Servet à Genève, écrivait à Sulzer que Servet après son évasion avait erré en Italie pendant presque quatre mois : "in carcerem est conjectus. Unde nescio quomodo elapsus, per Italiam erravit fere quatuor menses."

        D'autres récits étaient fait par diverses personnes qui prétendaient avoir vu Servet, et comme bien souvent dans de tels cas, cela ressemblait plus à de l'affabulation qu'à la vérité.
        Plus sérieusement, des preuves attestent que Servet après un bref passage en Espagne, décidait d'aller au Royaume de Naples pour retrouver des compatriotes. Il choisissait un itinéraire qui le faisait passer en France. Il dormait une nuit au petit village de Haute Savoie de l'Eluiset, seulement à quelques kilomètres à l'ouest de Genève. Débarrassé de son cheval, à pied et seul, il arrivait le 13 août 1553 à Genève. Une fois sur place, il entrait dans le 'Rose d'Or', à l'angle de la place du Molard et de la rue du Rhône, à ce moment-là, l'hôtel le plus confortable de la ville.
        C'était un dimanche et même un étranger ne pouvait pas être absent de l'église sans s'attirer des ennuis. Il aurait donc assisté au culte de l'après-midi à l'église de la Madeleine, tout en se tenant caché par son manteau et son chapeau, et au moment où il écoutait le prédicateur, il fut identifié par des personnes, lesquelles par le passé, il s'était occupé comme médecin à Vienne, et celles-ci sont allées immédiatement le rapporter à Calvin.

        Il serait assez lourd de rapporter ici le contexte politique et religieux du moment, qui toutefois avait un rôle très déterminant dans le contexte du procès de Michel Servet…
        …Calvin organise son arrestation. Il justifie l'arrestation de Michel Servet auprès du magistrat pour hérésie. Servet était alors appelé en dehors de l'église et placé dans la prison de la ville, où il était incomunicado (gardé pour le plaisir de Calvin), et ne la quitterait jamais, sauf pour être mené au bûcher.
        Dès le lendemain, le 14 août, comme la loi l'exigeait les accusations devaient être fournies à l'accusé pour sa défense qu'il devait assumer par lui-même. La plainte était ainsi élaborée en vingt huit articles par Calvin, basée sur des enseignements hérétiques trouvés dans l'ébauche de manuscrit du Christianismi Restitutio de Servet qu'il avait reçu plusieurs années auparavant. Servet alors répondait aux accusations une par une, en admettant certaines, en niant d'autres, faisant des réponses nuancées pour encore d'autres.
        Le Conseil ayant reçu les avis des contradicteurs décidait que les plaintes requises étaient suffisantes pour la poursuite des investigations. Servet souhaitait en débattre publiquement avec Calvin, mais cette requête fût rejetée et tout semblait indiquer l'hostilité à son égard et promettait un combat de longue haleine. En fait le procès était bel et bien engagé cette fois et les évènements extérieurs ne favorisaient pas un bon déroulement.

        Une différence était notable, Servet était enfermé à double tour et Calvin était libre !

        Pour comprendre cette particularité, il faut se pencher sur les lois de Genève d'alors et des 'poena talionis'.
        Quand Calvin demandait au magistrat l'arrestation de Servet, il lui répondit que ceci ne pouvait pas être fait légalement à moins qu'une personne soit en même temps soumise à l'emprisonnement comme accusateur. Nicolas de la Fontaine, un domestique de Calvin se tenait en tant qu'accusateur nominé à sa place, en raison que ce dernier était trop occupé pas ses fonctions ! Pour les lois de la République donnée, comme barrière pour une accusation malveillante ou pour des accusations infondées de crime sujettes à une punition corporelle, l'accusateur devait être placé avec l'accusé jusqu'à ce que l'affaire soit finie, et que si l'accusation n'était pas établie, il devait lui-même souffrir de la peine pour le crime dont il porté l'accusation, les prétendues poena talionis.

        Talionis du latin veut dire talion et poena peine, ce qui indique 'la peine du Talion'. Ce qui est intéressant dans la formulation des lois de la dite République, c'est que 'la peine du Talion' diffère de 'la loi du Talion' dont cette dernière avait pour but une 'équivalence' de peine pour celui qui avait fauté dans les faits, alors que là pour 'la peine du Talion' il est question d'équivalence, non pas sur les faits mais sur des accusations qui s'avèrent être fausses ou improuvées, ce qui ne rend pas la même signification.
    Reprenons ce qu'enseigne la Bible à ce sujet :
        Lorsque deux hommes se battent, et qu’ils heurtent une femme enceinte, s’ils la font accoucher, sans autre accident, le coupable sera passible d’une amende que lui imposera le mari de la femme, et qu’il paiera selon la décision des juges. Mais s’il y a un accident, tu donneras vie pour vie, œil pour œil, dent pour dent, main pour main, pied pour pied, brûlure pour brûlure, blessure pour blessure, meurtrissure pour meurtrissure. Si un homme donne un coup dans l’oeil de son serviteur ou de sa servante, et qu’il lui fasse perdre l’œil, il le mettra en liberté en compensation de son œil. Et s’il fait tomber une dent à son serviteur ou à sa servante, il le mettra en liberté en compensation de sa dent. Si un bœuf frappe de sa corne un homme ou une femme, et que la mort s’en suive, le bœuf sera lapidé, on n’en mangera pas la chair, mais le maître du bœuf sera quitte. Mais si le boeuf frappait de la corne depuis longtemps, et que son maître, en ayant été averti, ne l’ait pas surveillé, le bœuf sera lapidé, s’il tue un homme ou une femme, et son maître aussi sera mis à mort. Si on impose au maître un prix pour le rachat de sa vie, il paiera tout ce qui lui aura été imposé (Exode 21,22-30).

        Si bien même dans la tradition juive, on constate que cette formulation n’a jamais été prise au sens littéral, la faute reconnue sur des faits affirmés méritait réparation. Du reste, tout le passage biblique le montre sans ambiguïté : loin d’inciter à la vengeance, l’Écriture veut au contraire encadrer strictement dans des règles de droit la sanction des délits, "selon la décision des juges", précisément pour prévenir les excès des vengeances spontanées, ce qui précisément nous amène un autre aspect que celui de l'enseignement de Jésus et du Nouveau Testament dans l'application des peines. Il est à remémorer que Calvin avait été rappelé à Genève pour remettre l'ordre moral en place et empêcher le pouvoir Catholique de s'imposer dans la ville, et que dans ce but toutes les mesures qu'il adoptait faisaient actes d'autorités au même titre que des lois civiles. Est-ce légal pour un magistrat chrétien de faire des lois, rendre le jugement, et punir le méchant ? Deux arguments doivent être maintenant apportés :
        -Le premier est à l'exemple des Vaudois et des anabaptistes (alors sévèrement réprimandés) qui niaient tous ces points. Ils discutaient l'obligation d'obéir aux lois qui détruisent la liberté chrétienne, et que les jugements sont défendus dans, Mat : 5,40 "Si un homme veut te faire un procès et prendre ta tunique, laisse-lui même ton manteau" et, I Cor : 6, 7 "De toute façon, c'est déjà pour vous une défaite que d'avoir des procès entre vous, Pourquoi ne pas vous laisser dépouiller ? " Finalement, la peine de mort semble être interdite aux chrétiens dans, Mat : 5,38 et 39 "Vous avez entendu qu'il a été dit : Œil pour œil et dent pour dent. Et bien je vous dis de ne pas résister au mal", il est évident que de plus sous l'ancienne loi l'application du poena talionis était seulement permise aux magistrats, donc, Christ défend cette chose même, et dit aussi en Mat : 26,52 "Tout ceux qui prennent l'épée périront par l'épée."
        -Le deuxième argument est que de Calvin, qui, bien qu'il réprouve contre les anabaptistes qu'il doit y avoir dans les codes civiles de l'Eglise, des jugements, et le pouvoir militaire, néanmoins il établi que les codes civiles ne sont pas reliés à la conscience, ce qui avait été déjà enseigné avant lui par le 'mystique' chancelier de l'Université de Paris Jean Gerson (1363-1429) et du professeur Almain Jacques (né en 1512).
        Ce qui suit évoque leurs raisons :
        Premièrement, parce que le pouvoir politique est temporel, il a, donc, rien à faire avec la conscience.
        Deuxièmement, parce que la fin des codes civils est la paix externe.
        Troisièmement, parce que le dirigeant ne juge pas les choses intérieures.
        Quatrièmement, parce que le dirigeant ne peut pas infliger une peine spirituelle, il ne peut pas imposer donc le devoir.
        Cinquièmement, parce qu'un dirigeant ne peut pas absoudre, donc il ne peut pas contraindre.
        Sixièmement, parce que le même péché serait puni deux fois, une fois ici, et une fois dans le monde prochain.
    Septièmement, parce que la plupart des dirigeants ne projettent pas de contraindre sous la peine du péché.
        Huitièmement, parce que nous devons plutôt que de casser un code civil plus important, casser une loi Divine de moindre importance, ainsi en cela on ne tromperait pas ou on n'affecterait pas le bien commun, mais cette dernière oblige seulement sous la peine du péché véniel, donc l'ancienne n'oblige pas du tout, pendant que s'il elle obligé sous la peine de péché, surtout du péché mortel, ce serait notre devoir d'éviter le péché mortel au lieu du Véniel.

        En considérant tout cela, Calvin avait-il le droit de se mettre en avant comme il l'avait fait lors du procès de Servet ? A un moment, voyant le tour critique que l'affaire supposait, il venait en avant, demandait la permission de remplir le rôle de procureur, et il y était autorisé, quoi que l'assistance puisse souhaiter ! Les démarches ont alors reprises, et l'examen poursuivi, maintenant dirigé par Calvin. Sa place n'était-elle pas plutôt en prison telle la loi initiale de la République le prévoyait ? Faut-il s'étonnait maintenant que toutes les requêtes de Servet soient restées lettres mortes ? Que demandait Servet qui n'était pas justement son plein droit ? N'avait-il pas raison de se plaindre des conditions injustes qu'il subissait ? Ses trois lettres bien que courtes sont éloquentes de ce qu'il vivait en prison…

        …Dans le déroulement de l'affaire, Servet avait pour sa part dès le 22 août adressé au Conseil une supplique qui indique plus loin à quel point il était confiant quant aux résultats de son procès. Il a demandé, premièrement, qu'il soit remis en liberté pour l'accusation criminelle qu'il encourrait, en raison de l'âge apostolique et des premières Eglises religieuses, les questions n'étaient pas déterminées dans des cours criminelles, mais seulement par les églises elles-mêmes, et que de toute façon la punition pour hérésie était seulement l'exil. Deuxièmement, en cela, comme il n'avait créé aucune sédition ou n'avait dérangé la paix à Genève ou ailleurs, qu'il n'avait jamais discuté formellement des questions doctrinales avec des théologiens, et avait toujours condamné les anabaptistes pour leurs vues sur le gouvernement civil, il devait ne plus être chargé du crime pour ces raisons. Troisièmement, comme il était un étranger, et ignorant des coutumes du pays, il devrait lui être accordé des avocats légaux. Cette requête lui fut refusée et l'affaire se poursuivit dans des discutions écrites entre les deux protagonistes. A cet effet il est remarquable de voir de quelle manière Calvin tournait ses écrits comme dans sa 'Brève Réfutation des erreurs de Servet' quand il disait : "n'importe quelle personne qui réellement et sérieusement réfléchie sur le sujet reconnaîtra quel était son but, d'éteindre la lumière de la saine doctrine, et renverser toute la religion." Une déformation plus complète du vrai but de Servet par ces trois derniers mots exprimés, il serait impossible de le faire.

        Douze jours étaient passés depuis que Servet avait répondu aux articles présentés par Calvin, et il n'avait reçu aucune réponse. La réponse et la Réfutation de Calvin en fait s'étaient trouvées pendant dix jours dans les mains du Conseil, qui alors été trop préoccupé avec la lutte principale, maintenant au plus haut, entre les libertins et Calvin pour prendre n'importe quelle attention, et laissait pour mineure celle avec Servet. Tout ce temps, Servet attendait impatiemment et cela faisait des semaines qu'il croupissait en prison. Après n'avoir reçu aucune réponse, il concluait que Calvin était au bout de ses possibilités et n'en avait aucune à donner et se plaignait de ses conditions de détention. Il adressait donc au Conseil le 15 septembre une lettre…

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        …Mes plus honorables Seigneurs. (1ère lettre)

        Je vous demande humblement que vous raccourcissiez ces longs délais ou que m'acquittiez de l'accusation de crime. Vous voyez que Calvin est dans un cul de sac, ne sachant pas quoi dire et pour ses désirs de plaisir me fait pourrir ici en prison. Les poux me mangent vivant, mes vêtements sont déchirés et je n'ai rien pour me changer, ni veste ni chemise, juste une mauvaise. Je vous ai envoyé une autre demande ce qui était selon Dieu, mais afin de l'empêcher Calvin vous a cité Justinien. Certainement qu'il est malveillant pour alléguer contre moi ce qu'il ne croit pas lui-même. Par lui-même il ne croit pas que Justinien avait mentionné l'Eglise Sainte, au sujet des évêques, au sujet du clergé, et d'autres sujets de religieux et sait bien que l'Eglise avait déjà dégénérée. C'est une grande honte de sa part, à plus forte raison que déjà pendant cinq semaines où il m'a maintenu enfermé ici, et il n'a pas allégué contre moi une simple page.
        Mes seigneurs, j'ai également à vous demander un avocat ou à un procureur qui parlerait de ma part, comme vous l'avez permis à mon adversaire qui n'était pas dans la même situation que moi. Pour être un étranger ignorant des coutumes de ce pays je ne peux pas me défendre. Vous lui avez permis un avocat et pas à moi, et vous l'avez libéré de prison. Je demande que mon affaire soit présentée devant que le Conseil de Deux Cents avec mes demandes et si je peux appeler je serais ainsi prêt pour assumer tous les dépenses, pour perte et intérêt, et pour les ' poena de talionis', contre mon premier accusateur et contre Calvin, son maître, qui a pris l'affaire lui-même.

        En prison de Genève, 15 septembre 1553. Michael Servet pour sa propre affaire.


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        Le Conseil a pris notification, a donné l'ordre que ses besoins lui soient fournis, à ses propres frais, mais l'ordre n'a jamais été obéi !
        Calvin l'avait maintenu en prison sans prouver un seul point. Maintenant avisé des poursuites de Calvin, Servet pouvait répliquer tout en continuant de se plaindre au Conseil par une autre lettre qu'il présentait au Concile, dans laquelle, sur un terrain entièrement nouveau, il assumait une vigoureuse offensive contre Calvin. Il avait été évidemment persuadé, ou persuadé lui-même, que sa victoire était assurée, et il venait en avant en tant qu'accusateur de Calvin pour le crime de faire des fausses accusations contre lui…

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    …Honorables Seigneurs. (2ème lettre)

        Je suis détenu pour des accusations criminelles faites par Jean Calvin qui m'accuse faussement disant que j'ai écrit :
        1. Que les âmes sont mortelles
        2. Que Jésus le Christ a pris de la Vierge Marie seulement la quatrième partie de son corps.
        Ce sont des choses horribles et exécrables. Parmi toutes les hérésies et tous les crimes il n'y en a aucun aussi grand quant à prononcer la mortalité de l'âme. Pendant que pour tout autre il y a un espoir de salut, tandis qu'il n'y en a aucun pour une telle hérésie. Celui qui dit ainsi ne croit pas qu'il y ait Dieu, ni justice, ni résurrection, ni Jésus le Christ, ni Saintes Ecritures, ni toute autre chose. Il croit seulement que tout meurt et que l'homme et la bête sont les mêmes. Si j'avais dit ou avais écrit ceci, pour offenser le monde je devrais me condamner à mort. Par conséquent, mes seigneurs, je demande que mon accusateur soit puni selon la loi du poena talionis et détenu comme prisonnier avec moi, jusqu'à ce que la question soit réglée par sa mort ou la mienne ou pour n'importe quelle autre punition. Et pour ceci je me soumets aux poena talionis mentionnés. Je suis content de mourir s'il n'est pas condamné pour ceci et d'autres choses que j'énumère ci-dessous. J'exige de vous, messeigneurs, justice, justice, justice.
        Écrit dans la prison de Genève, le 22 septembre 1553. Michel Servet pour sa propre cause.


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        Une troisième lettre était adressée de la part de Michel Servet aux membres du Conseil qui rappelait sa première et qui est certainement la plus touchante quand on sait que Michel Servet était maintenant détenu depuis plus 7 semaines dans des conditions insoutenables physiquement et moralement…

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    …Seigneurs magnifiques. (3ème lettre)

        Il y a maintenant trois semaines que j'ai cherché et ai demandé une assistance et je n'ai pu pas en obtenir une. Je vous prie pour l'amour de Jésus Christ de ne pas me refuser ce que vous ne refuseriez pas un Turc, qui chercherait la justice de vos mains. J'ai quelques sujets importants et nécessaires à communiquer. Quant à ce que vous avez ordonné que quelque chose me soit fait pour me maintenir propre, rien n'a été fait et je suis en plus mauvaise condition qu'avant. D'ailleurs, le froid m'afflige considérablement, en raison de ma colique et de mon hernie, me causant d'autres plaintes que je devrais avoir honte de décrire. C'est une grande cruauté que je n'ai pas la permission de parler si ce n'est seulement de remédier à mes nécessités. Pour l'amour de Dieu, mes seigneurs, donnez votre ordre par pitié ou par devoir.

        Écrit dans la prison de Genève, 10 octobre 1553.

        Michel Servet.


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        Tout ce temps l'état de Servet se développait plus pitoyablement. Sa première pétition pour demander des conforts décents de vie n'avait apporté aucune réponse, et il était plus misérable que jamais, tremblant de froid, et torturé par des infirmités physiques. Dans cette dernière lettre, il sollicitait le Conseil pour l'amour de Dieu de lui accorder du soulagement et ceci a été donné après une longue attente. Peut-on seulement imaginer la solitude de Servet dans de telles conditions. Il ressentait que la rapide déchéance de sa condition physique lui serait préjudiciable pour assumer pleinement sa défense et en appelait à l'amour pour Dieu en dernier ressort aux membres du Conseil.

        Rien n'obligeait avant le dix huitième siècle qu'un avocat soit fourni aux accusés qui devaient par conséquence assumer eux-mêmes leurs défenses. Toutefois, si Servet connaissait certainement mal les lois en vigueurs du pays, tel il le précise dans sa première lettre, dans certaines affaires il pouvait être attribué un avocat et ne manque pas de le rappeler dans cette même lettre. A notre époque tout ceci semble des plus choquants et démontre à quel point pouvaient être liés l'Etat et la religion. Certains historiens aiment dire que tout transpirait la religion et que la liberté religieuse était loin d'être acquise à cette période.

        La suite du procès était que pures formes d'échanges entre leaders religieux, mais tous s'accordaient pour la fin de Servet, dans le but de satisfaire la bonne image des églises suisses au regard des étrangers qui attiraient une attention particulière sur la mauvaise réputation de celles-ci pour leur indulgence de l'hérésie et des hérétiques. Cette providentielle occasion offrait maintenant de dégager un tel soupçon.
        Quelques divergences d'opinions auraient pu être au sujet de la façon d'appliquer la punition, mais il y eu pratiquement rien sur la question de l'acquittement, et la sentence fut prononcée sans discussion le 26 octobre.

        Il était condamné pour être lié et porté à l'endroit appelé Champel, et de là d'être attaché à un pieux et brûlé vivant ainsi que ses écrits et livres imprimés le 27 octobre 1553. Il sollicita le bourreau de ne pas prolonger sa torture, et quand il vu la torche, il poussa un cri terriblement perçant, alors que les personnes horrifiées jetaient sur lui plus de bois, et Servet pleurait, "Ho ! Jésus, Fils du Dieu éternel, ait pitié de moi." Après environ une demi-heure, sa vie s'est éteinte, et il n'avait fait aucun signe, mais que pouvait-il encore espérait des hommes… 

     


        *Je remercie la "Servitus International Sociéty", qui m'a donné la possibilité d'utiliser ses trois exceptionnels documents et plus particulièrement Juan E. Naya avec qui j'ai correspondu.

    Le Roux Didier


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